« Ouais alors c’est bon ? Non je vais l’appeler moi-même. En tout cas merci mec, il va être content. Ouais t’inquiètes on se fait ca très bientôt ! Ouais. Ciao ! » Noah lança le téléphone dans son canapé et se mit en direction de sa cuisine afin de grignoter quelque chose. Malheureusement il y avait bien longtemps qu’il n’avait pas fait les courses et la seule chose qu’il trouva s’avéra être une pomme. Son envie de grignoter partie donc en fumer et une lumière lui traversa l’esprit. Il reprit son téléphone et laissa un message sur le répondeur de son ami Ewan : « C’est Noah. Dis j’ai peut être une bonne nouvelle pour toi, on se retrouve au café en bas de la rue, dans disons une heure ? Enfin j’espère que tu auras ce message sinon je ne suis pas dans la mer**. Enfin bref, à tout à l’heure j’espère ! » Voilà une bonne chose de faite. Maintenant il n’avait plus qu’à aller prendre une douche, s’habiller, et se rendre au point de rendez vous. Ces temps ci, il avait beaucoup de temps libre puisqu’il ne travaillait sur aucun projet. Non pas parce qu’il ne voulait plus faire de film, mais juste qu’il attendait le script parfait, celui qui lui donnerait envie de se lever à 4 heures du mat’, de dire « action » a tout bout de champ, de subir les caprices de ses acteurs…. Bref, il attendrait donc patiemment qu’un petit bijou arrive entre ses doigts. Pour le moment, ce n’était que des ébauches pas très bien construites, de gens qui se disent « talentueux » pleins de bonnes idées. Foutaise. Pas un ne valait la peine d’en faire un film, ou même de le sortir en livre ! Quand il lut néanmoins l’ébauche d’Ewan, il fut agréablement surpris d’y trouver quelque chose d’intéressant, fourni, pleins de sentiments. Mais n’ayant pas de garantie pour ce projet, il avait proposé à Ewan d’en parler à deux trois de ses amis réalisateurs. Et ce matin même, quelqu’un avait appelé pour lui dire qu’il était partant ! Noah n’avait plus qu’à les mettre en relation et a donné deux ou trois conseils à son ami pour que tout cela soit fabuleux. C’était donc la raison de ce rendez vous au café. Après une demie heure sous la douche, il prit un jean, un tee shirt et un sweat au hasard dans son armoire et s’habilla. Il lui restait qu’un quart d’heure à attendre. Il ferma donc son appartement, et sortit de son immeuble en partant en direction du café tranquillement. Il en profiterait pour grignoter un ou deux cookies et relire quelque passage de l’ébauche d’Ewan. Il fit donc son entrée dans le café, salua les serveuses, qu’il connaissait assez bien, même trop bien, et s’installa à une table près de la baie vitrée. Il était en train de parler à la serveuse quand il vit son ami entrer dans le café. Quinze minutes d’avance, comme à son habitude. C’était aussi ca qu’il aimait bien chez Ewan : son professionnalisme. Il savait être à l’heure et c’était un plus dans ce métier. Il le héla de la main tout en lui lançant un petit « Hey ! » avec un grand sourire.

Le retour d’Ewan à San Francisco n’était pas forcément aussi agréable qu’il aurait pu l’être. Le beau brun avait quitté cette grande ville quelques mois plus tôt sur un coup de tête, et la raison de son retour n’était pas difficile à comprendre : il voulait se racheter auprès de son ex-fiancée. La seule chose de bien qui s’était produite était d’un point de vue strictement professionnel. Les artistes, et donc les écrivains, sont souvent des gens qui s’inspirent de deux sentiments totalement antagonistes : le bonheur et la souffrance. Si jusqu’à présent le premier avait été le fer de lance d’Ewan, le deuxième avait été son principal moteur depuis six mois. C’était intéressant pour lui de comparer la qualité et le contenu de son travail qu’il fournissait en fonction de son humeur. Il ne lui restait pas grand-chose à faire pour terminer son dernier livre, et il était plutôt content du résultat, tout comme son éditeur. C’est d’ailleurs ce dernier qui lui a suggéré de contacter quelques réalisateurs. Honnêtement, Ewan ne sait pas trop pourquoi c’est Noah qu’il a choisi dans toute la liste, mais il l’a fait en suivant son instinct. Et il s’est avéré que le jeune réalisateur en question était adorable et compétent de surcroît. Ewan ne regrettait pas d’avoir fait cette démarche, cela lui avait permis d’essayer d’élargir ses horizons, et surtout de connaître quelqu’un de sympathique.

La journée avait démarré de façon très banale. Après avoir entendu son réveil sonner, Ewan avait jeté un coup d’œil à son téléphone portable espérant y trouver un message de Teddy-Jules. Mais il n’y avait rien de tout cela. Soupirant, il enfila une tenue de sport et parti courir après avoir englouti un café mal réchauffé. Il adorait faire du sport, et en fait c’était très certainement la seule chose qui lui permettait de garder la tête froide ces derniers temps. Après une bonne heure, il rentra à nouveau chez lui, direction la salle de bain. Il était sous la douche quand son téléphone sonna, et décida que si la personne avait quelque chose d’urgent à lui dire, elle lui laisserait un message vocal. Ce fut le cas, et quand il sortit pour s’essuyer, il écouta ce dernier à l’aide du haut-parleur de son téléphone. Il n’eut pas de mal à reconnaître la voix de Noah, et le message qu’il venait de lui laisser l’intriguait fortement. Il regarda l’heure, se rasa, s’habilla d’un jean et d’un polo, et se mit en direction du fameux café. Un quart d’heure d’avance, comme toujours. Une manie qui arrangeait tout le monde généralement, sauf lui quand la personne d’en face osait être en retard. Il repéra facilement Noah, puisque ce dernier l’aida un peu dans sa tâche. « Hey ! » Ewan se mit à sourire et se dirigea vers la table en question, serrant la main de son ami. «Salut Noah, tu vas bien ? Je dois avouer que je ne m’attendais pas à ce que tu me donnes rendez-vous si rapidement. Je me demande bien ce que ça cache ! ». Ewan offrit à Noah un sourire taquin, laissant presque penser que ce dernier avait de mauvaises intentions, comme de lui donner rendez-vous pour aller le tuer après dans une rue étroite et sinistre ! Oui, Ewan avait tendance à aimer faire enrager les gens. La taquinerie et les blagues à deux francs six sous, ça le connaissait. On s’habitue rapidement à cette petite dose d’humour, heureusement. La serveuse étant toujours là, il trouva bon de commander à boire. « Pour moi ce sera un café liégeois s’il-vous-plaît. Et toi tu prends quoi ? »

Noah se releva de sa chaise à la vue d’Ewan, et ils se serrèrent la main. Ewan ne manqua de lui faire part de son incompréhension face à ce mystère. «Salut Noah, tu vas bien ? Je dois avouer que je ne m’attendais pas à ce que tu me donnes rendez-vous si rapidement. Je me demande bien ce que ça cache ! » Pour simple réponse, Noah baissa la tête et sourit. Il savait qu’Ewan pouvait aller très loin dans le métier avec son petit coté blagueur et décontracte. La serveuse était à la table, et attendait patiemment leur commande. C’est Ewan qui commença : « Pour moi ce sera un café liégeois s’il-vous-plaît. Et toi tu prends quoi ? » Noah se tourna vers la serveuse et mit un bras à sa taille en se penchant légèrement vers son badge pour y voir son prénom. « Et bien, Heidi, j’aimerais beaucoup un café. Serrée. Très serrée. » Il gratifia d’ailleurs cette dernière par un petit clin d’œil qui la fit rougir et qui lui donna le signal pour partir leur chercher cela. Noah était un dragueur né. Non pas qu’il couchait avec des tonnes de femmes, non, il aimait tout simplement s’assurer qu’il plaisait aux femmes. Bien évidemment à 99% de fois, les femmes répondaient à son charme. Les 1% représentaient les femmes mariées, ou bien aveugle.
Alors qu’il regardait la femme s’éloigner, il retourna finalement la tête vers son ami et ouvrit le dossier devant lui, contenant plusieurs extraits du bouquin d’Ewan. « Ecoutes, j’ai une bonne et une mauvaise nouvelle. La bonne c’est que j’ai trouvé un ami pour t’aider dans ta démarche. » Noah était content de lui. Son ami méritait de tenter l’expérience de la reconnaissance de son talent. Et c’était d’ailleurs pour ça qu’il avait fait circuler très rapidement cette ébauche. Ca, et aussi parce qu’il ne faisait quasi plus rien de ses journées. « La mauvaise par contre concerne ton travail. Certains passages sont trop … simples. Enfin je veux dire, pour un bouquin, oui peut être, mais il faudrait rajouter un peu de peps, de fraicheur, du suspense. Tu vois ce que je veux dire ? » Noah était parti tellement dans ses conclusions qu’Ewan avait l’air perdu. Cela n’échappa pas à Noah qui essaya immédiatement de le rassurer. « Mais je vais t’aider hein. Le réalisateur a qui j’ai parlé nous accorde un mois pour mettre en place des bases solides et réfléchir aux choix des acteurs, des lieux… Mais bien évidemment ca restera superficiel, pour qu’après tu vois tout ca avec lui. Disons que je joue les chaperons pour débuter ! » Au même moment la serveuse revenait à la table avec un grand sourire. Elle déposa les deux tasses et repartit derrière le bar.