Un sourire devant l'objectif, une pose suggestive, un autre sourire. Tout est dans le simulé car sourire devant l'appareil du mari de son ex n'est pas facile. Je ne peux pas m'empêcher de penser que si je n'avais pas fait l'erreur de répondre non à Andreas, je serais à sa place. Mais je lui souris car c'est mon métier et car il n'a aucune idée de ce à quoi je pense. Il ignore même que je connaissais sa femme avant qu'ils ne viennent à San Francisco et il pense sûrement qu'elle m'a engagée sans raison particulière. Je continuais donc de poser comme il me le demande en évitant de penser à tout ça. Quand il me dit que la séance est terminée, je souris, contente d'arrêter. Comme je sais que nous reprendrons cet après-midi, je garde la robe que je porte et j'enfile juste une veste par-dessus avant de sortir du studio photo. Je me dirige vers le bureau de la patronne qui, j'ai l'impression, m'évite en ce moment. Je sais que Jake reste dans le studio pour d'autres photos avec d'autres mannequins alors je devrais pouvoir réussir à parler à Andreas. Je frappe à la porte en recoiffant machinalement. J'entre après avoir entendu l'autorisation et je pris soin de refermer la porte derrière moi. « J'aurais besoin de ton avis Andy. » Je m'approchais de son bureau en souriant. « J'hésite à me faire un nouveau tatouage. Soit... » Je soulevais ma robe dévoilant sans gêne mon boxer et je montrais le haut de ma hanche. « Ici. Ou bien... » Je me retournais en remontant l'arrière de ma robe et en montrant le bas de mon dos. « Là. » Je me retournais en laissant retomber le tissu et en souriant. « Tu sais que j'en ai déjà un un peu plus bas et il me semble que tu l'aimais bien. » Aucun doute là-dessus, elle l'aimait beaucoup à l'epoque où nous étions ensemble mon tatouage caché sous mon boxer. Mais j'attendais de voir quelle serait sa réponse.

« Et qui es-tu pour juger qui je suis ? Nous ne sommes ni amies, ni parentes, ni amantes . » Bien sûr, je savais que ma phrase risquait de ne pas lui plaire. Mais de là à être aussi méchante. Je savais bien tout ça, pour mon plus grand malheur. Et le fait qu'elle ajoute le dernier mot était encore plus douloureux. « Oui, tu as raison, ça doit être mon travail qui me ronge et pas la bonne dizaine d'employés comme toi qui viennent chaque jour se plaindre à mon bureau . » Je ne relevais pas et décidais de faire ce que j'avais décidé. Je ne voulais pas craquer ici, devant elle. Ce serait trop humiliant de pleurer devant elle alors qu'elle semblait si insensible et si heureuse sans moi. Alors je prononçais quelques mots, une excuse bidon et je tournais les talons. Je ne pus m'empêcher d'entendre Andy se lever mais je continuais quand même. Je ne voulais pas céder aussi facilement. Je voulais que ce soit elle qui me dise de rester et non pas moi qui reste de mon plein gré. C'était peut-être égoïste mais je voulais de l'espoir. Je ne comptais pas abandonner à moins d'être sûre de n'avoir aucune chance. « A...Attends.... Maryan ... Tu ... Ton photoshoot, dans une heure, ne sois pas en retard . » C'était tout ? Je pris une inspiration avant de me retourner et de la regarder dans les yeux. Je ne pus m'empêcher de penser à quel point elle était belle et m'avait manqué. J'avais envie de revenir en arrière pour défaire la pire erreur de ma vie et la garder avec moi pour toujours. Mais je ne pouvais pas remonter le temps alors je ne pouvais qu'essayer de la récupérer. « Oui je sais. Je n'ai pas besoin de toi pour savoir mon emploi du temps. » J'optais pour la froideur, meilleure solution pour éviter de souffrir - et surtout de ne pas montrer la tristesse. « C'est vraiment tout ce que tu as à me dire ? Si c'est le cas, je ferais mieux de partir. » dis-je, sûre de moi. Je ne détournais pas mon regard du sien bien que je ne voulais qu'une chose : sortir d'ici et aller me planquer dans un coin pour pleurer.

« Oui je sais. Je n'ai pas besoin de toi pour savoir mon emploi du temps. » assura t-elle rudement, alors qu'elle s'était retournée pour la fixer avec hardiesse du regard, magnifique et flamboyante dans sa colère. Andreas eut un pincement au cœur de la blesser malgré elle « C'est vraiment tout ce que tu as à me dire ? Si c'est le cas, je ferais mieux de partir. » . Tout ce qu'elle avait lui dire ? Pas vraiment. Tout ce qu'elle pouvait lui dire ? Certainement. Depuis qu'elle l'avait engagée deux mois auparavant, c'est à peine si elles s'étaient adressée la parole, ce qui n'était sûrement pas la faute de Maryan puisque cette dernière avait tenté plusieurs fois d'engager la conversation, mais celle d'Andy qui l'avait fuit avec vigueur. Elle soupira. Il fallait qu'un jour, elle accepte d'en parler. Mais accepter d'en parler ne ferait que rendre leur ancienne relation plus réelle, ce qu'elle avait toujours évité par honte. Non, la jeune femme ne supportait qu'une personne du même sexe qu'elle puisse l'attirer à ce point, et bien peu de gens avaient été mis au courant de ce qui l'unissait à Ryan, du temps de leurs amours. Un choix que la blonde avait d'abord supporté, puis qui avait causé leur séparation. Andy se mordit la lèvre et leva les yeux au ciel pour marmonner « Qu'est-ce que tu veux entendre ? Qu'est-ce que tu attends de moi ? Dis le ! ». Elle avait finis sa phrase en criant, les larmes aux yeux d'être allée si loin et d'avoir révélé le fond de sa pensée. Elle ne faisait qu'éviter de dire une vérité qui la faisait souffrir, Maryan le savait. Cependant, elle ne put se résoudre à la regarder à nouveau dans le fond glacé des yeux de son ex . Il avait fallu peu de choses pour la mettre à bout, et elle se maudit d'avoir formulé ces questions : elle était vulnérable et terriblement faible quand il s'agissait de Maryan. Énervée, elle n'en resta pas là et ajouta, furibonde « Tu es contente de toi ? Tu as réussi à me foutre à bout . Bravo, on applaudit l'artiste ! » elle claqua la porte derrière elles. C'était une discussion privée qui ne regardait personne. D'autant que son mari n'avait jamais été au courant de certains de ses penchants homosexuels et qu'elle n'avait pas jugé utile de lui révéler. Andy avait abandonné son rôle froid de patronne hautaine et hostile. Le pire dans tout cela, au delà de la colère qu'elle ressentait au plus profond de ses tripes, c'était cette sombre pulsion qui s'emparait d'elle et qui la poussait dans les bras de cette déesse blonde. Elle n'y céda cependant pas. Tout contact physique avec Maryan la dévierait de son objectif premier : mettre les choses au clair. La directrice de LIBER-TEEN, cependant, relâcha la pression qui s'abattait ses ses épaules et demanda, suppliante « Pourquoi es-tu ici, exactement ? ».. Sans lui donner d'explication, son ex tourbillonna en une étincelle de cheveux blonds et s'enfuit littéralement de la pièce.